J’ai toujours souffert d’un cycle menstruel difficile et capricieux : mes ménarches sont survenues alors que je n’avais que 10 ans, alors que j’avais déjà clairement atteint la puberté sans trop m’en rendre compte. Ces premières années passées à saigner l’ont été dans la souffrance et la douleur, de crampes si douloureuses que j’en vomissais presque chaque mois; ces crampes étaient accompagnées de poussées de fièvre, faiblesse généralisée, sueurs froides et diarrhée. Et c’est sans parler d’un cycle très irrégulier, mais comme on me disait que cela était normal dans les premières années des menstruations, je n’ai pas poussé plus loin l’investigation auprès de médecin.
À 16 ans, j’ai commencé la pilule qui, outre le fait qu’elle m’a provoqué de violents maux de tête, étourdissements et nausées, a néanmoins pu réguler mon cycle et amoindrir les crampes. Au début de ma vingtaine, j’ai cessé la pilule parce qu’elle me procurait trop de désagréments et aussi parce qu’étant en couple avec une femme, je n’en avais plus réellement besoin. Mon cycle irrégulier est revenu à la charge mais, heureusement, les crampes horribles et vomissements eux ne sont pas revenus.
J’ai vécu de longues années (et c’est aujourd’hui toujours le cas) sans jamais savoir quand mes prochaines règles allaient arriver. On dit qu’un cycle “normal” est d’environ 28 à 35 jours; or le mien ne suit aucune logique : il passe de 43 jours à 50, puis à 47 ou à 62 le « mois » suivant.
En 2006, j’ai commencé à noter mes cycles, humeurs et symptômes. J’ai aussi commencé à ce moment à prendre de l’achillée-millefeuille, en tisane ou teinture, lorsque cela faisait plus de 30 jours depuis mes dernières règles. Selon mes notes, cela a fonctionné, puisque mes lunes finissaient par se pointer dans les cinq jours qui suivaient. J’ai poursuivi ce « traitement » pendant environ deux ans, de façon plus ou moins régulière.
Vers la mi-année 2009, j’ai commencé une approche « spirituelle et cultuelle » des menstruations sacrées : travaux chamaniques (voyages, transes, danse, rêves), sorciers (récupération et utilisation de mon sang pour la création d’encens, poudre, encre, etc.). Entre fin 2009 et fin 2012, l’apogée de mon travail spirituel et cultuel, je n’ai connu que deux cycles qui ont pris de plus 50 jours à se pointer, tous les autres ont oscillé entre 30 à 45 jours, pour une moyenne de 37-38 jours! Mes menstruations s’accompagnent de crampes mais elles sont tolérables, rien que deux Advils ne peuvent soulager.
2012 marque le retour des crampes intolérables et symptômes envahissants. Après des mois difficiles de consultations médicales, j’apprends que je souffre de dysménorrhée. Parmi les symptômes de la dysménorrhée qui attirent mon attention, ceux-ci sont les plus flagrants :
- Avoir été pubère avant l’âge de 11 ans;
- Avoir un excédent de poids;
- Souffrir d’anxiété;
- Règles très douloureuses à l'adolescence, qui se calment durant la vingtaine et reviennent lors d’un changement hormonal (j’ai eu 30 ans en 2009 et j’ai observé divers changements corporels depuis, dont le fait que j’ai quasiment tout le temps froid alors qu’avant, j’avais tout le temps chaud);
- La douleur provoquée par les crampes ne se limite pas au bas ventre : elle peut monter dans le dos, s’étendre aux hanches et même descendre dans les cuisses;
- Elle s’accompagne de vertiges, nausées, vomissements, fièvres, diarrhées.
Ce chaos correspond également à une période où j’ai cessé tout travail avec mes menstruations (tant médicinale que spirituelle) pour cause de troubles anxieux généralisés qui ont miné ma santé et mon énergie; pire, je n’en avais plus envie . Un an et demi plus tard, ma santé va nettement mieux, mon énergie est de retour et surtout, l’envie de retravailler avec l’aspect sacré des menstruations est de nouveau présente, et ça, c’est un réel bonheur.
Au quotidien et pour l’aspect « calculé » de la chose, c’est compliqué de ne pas savoir quand se pointeront mes prochaines règles. Le travail avec les menstruations sacrées s’inspire généralement des cycles de la lune ou encore de l’aspect justement cycle : dépouillement/mort, renaissance, etc. J’ai comme projet un super rite qui s’étalerait sur cinq mois : un mois par phase lunaire (nouvelle, croissante, pleine, décroissante, noire). Mais comment faire si on sait d’avance qu’on ne sera pas menstruée au moins un mois durant ces cinq mois?
Il y a quelques années, les menstruations étaient au coeur de ma pratique chamaniste féminine. Aujourd’hui, j’essaie de les réintroduire tout doucement, un mois (ou presque) à la fois. Comment faire confiance à ces alliées? Mes règles sont anarchiques, elles défient tout ce qu’on vante à propos des menstruations et leur cycle sacré!
Pour 2015, je prévois me remettre à la teinture d’achillée-millefeuille afin d’aider mon cycle à se régulariser. Je compte également reprendre le travail chamanique avec mes menstruations pour en (re)faire des alliées et aussi pour inclure mon sang dans des outils sorciers (comme une eau-de-sang purificatrice). C’est une première étape vers une réappropriation de moi-même!