Temple Yoni Matre
  • Accueil
  • Temple
    • À propos
    • Ishara Labyris - Prêtresse
    • Mes articles
    • Cours : Mystères Ishtaritu
    • Sadhana : Incarner la Déesse Amante en 7 leçons-clés
    • Adya Kali
    • Ibratu
    • Irkalla
    • Autel >
      • Autel à Notre Dame
      • Honorer la Déesse
      • Prières
    • Chamanisme féminin
  • Éditions
    • À propos
    • Shamanka : La Dame Arc-en-Ciel
    • Dames du Ciel et de la Terre
    • Soeurs-de-Lune : Sororité sacrée
  • Articles
    • Animaux de pouvoir
    • Brujeria et Curanderismo
    • Chamanisme féminin
    • Culte du Yoni
    • Déesses
    • Divination
    • Lectures
    • Mystères du sang féminin
    • Sexualité sacrée

.: Le Yoni et son sang de création

2/27/2013

0 Commentaires

 
.: The menstruating yoni
Tiré du livre «The Yoni»
Par Rufus Camphausen, traduit et adapté par Ishara Labyris

Une expression spécialisée de magie yonique peut être reconnue par l’étendue immense des pouvoirs qu’accordent les peuples de diverses cultures au fluide menstruel et particulièrement au tout premier sang menstruel, le sang qui signale la transformation d’une jeune fille en femme. Beaucoup d’ouvrages ont été publiés sur les différents tabous entourant les menstruations. Le fluide menstruel avait, croyait-on, des effets négatifs sur les autres humains, sur les animaux et la nature. Les femmes menstruées étaient séparées de leur tribu et de leur famille par crainte de contamination – elles devaient se tenir éloignées des endroits où le pain était cuit, où la nourriture était préparée et où les rois marchaient. Ces injonctions ainsi que des milliers d’autres, changeant d’une culture à une autre, et d’une époque à une autre, illustrent bien les pouvoirs que l’on accordait au fluide menstruel, même si ces pouvoirs étaient perçus comme dangereux.

Toutefois, il y a d’autres exemples, d’autres peuples, pour lesquels les menstruations étaient tenues en haute estime. Bien que cela soit particulièrement vrai pour les traditions de Tantra et Shakta, il y a d’autres exemples de d’autres cultures, sortant de cette sphère, incluant les suivants :

  • Chez les Incas, la déesse lune Mama Kilya, responsable de tous les phénomènes naturels cycliques, était vénérée comme la maîtresse du cycle menstruel.
  • Chez les alchimistes, l’énergie potentielle du sang menstruel était connue sous le nom de elixir rubeus («élixir rouge»). Cet élixir était, croyait-on, encore plus puissant lorsque généré durant la pleine lune.
  • Chez les adeptes de certaines écoles de Tantra dite de «Main-Gauche», boire le yonipuspa («fleur de vulve»), le fluide menstruel, est vu comme un moyen assuré d’atteindre la libération.
  • Dans la Perse antique, la déesse Jaki était responsable des menstruations. Durant les époques patriarcales, lorsque les menstruations obtinrent des connotations négatives, Jaki devint un démon, lequel exhortait les hommes à poser des actes mauvais.
  • Dans l’Égypte ancienne, les gens portaient une amulette de pierre rouge qui représentait les pouvoirs du sang menstruel d’Isis, la déesse la plus importante d’Égypte. (Le Tyet, peut représenté une image stylizée du yoni de la déesse Isis).
  • Le folklore atteste également de la même croyance envers le sang menstruel. À Calabria, en Italie, par exemple, les femmes portent sur elles quelques gouttes de leur sang menstruel dans une petite fiole, partout où elles vont. Si elles administraient ces gouttes à un homme de leur choix, on croyait que cet homme était alors lié à elles pour toujours.

Avant que nous ne nous attardions de plus près à savoir comment le sang menstruel est perçu et utilisé en Inde, nous devons d’abord savoir que les Indiens n’étaient pas les seuls à utliser le sang menstruel et les autres fluides du Yoni. Chez certaines sectes gnostiques, il existait une vision similaire à propos des pouvoirs des différents types de rajas (sécrétions féminines). Comme le rapporte Épiphane de Salamine (315-403), les jus d’amour et les fluides menstruels étaient traités avec révérence, étant rituellement collectés et utilisés à des fins rituelles religieuses.

Le Tantra et le Shakta font partie des quelques systèmes religieux dans lesquels les menstruations ne sont pas perçues comme étant impures, dangereuses, ni comme quelque chose devant être cachée. Au contraire, dans plusieurs sectes tantriques, et particulièrement chez les Shakta, le tabou menstruel de la société indienne est reconnu simplement comme un autre aspect de l’ignorance humaine en général. En ce sens, le tabou menstruel n’est pas «brisé» dans ces religions, il n’existe tout simplement pas, comme le suggère Ajit Mookerjee. Pour les hommes et les femmes qui perçoivent le sang menstruel comme étant sacré et digne de vénération, le temps des menstruations en est un spécial, et une femme dont le sang s’écoule est valorisée et honorée. Dans les pratiques rituelles, comme dans le Yoni Puja, une femme menstruée tient une place vraiment spéciale, non seulement pour la qualité différente de son énergie à ce moment précis, mais aussi à cause du sang lui-même, l’unique et magique sang-de-lune qui est la propriété et le pouvoir de la femme. Ainsi, lorsque les tantriques dits de «Main-Gauche» mélangent le fluide menstruel au vin et le boivent comme boisson rituelle, ou qu’ils embrassent le Yoni durant le puja plutôt que de simplement le toucher, ils reproduisent un rituel probablement aussi âgé que l’Homo Sapiens, un rituel qui avait lieu il y a 25 000 ans dans les chambres yoniques spéciales des caves paléolithiques.

Plusieurs auteurs indiens sont toutefois honteux de tels aspects de leur héritage; ils ne parlent que difficilement de tout ce qui pourrait être dire à propos du culte du yoni dans la culture indienne. Par exemple, dans son livre «Goddess cults in Ancient India», Jagdish Tiwari, affirme que les Grecs de l’Antiquité sont responsables de la nudité des figures de l’Inde. Lorsque Ajit Mookerjee dit : «en Kerala, une cérémonie appelée trippusharattu se tient huit à dix fois par an. Lors des cérémonies une nappe colorée de rouge ceint l’image de la déesse, laquelle est recherchée par les pèlerins et prisée comme relique religieuse», ce qui est dit n’est qu’une partie de la vérité. L’auteur ne nous dit pas comment ou avec quoi cette nappe, qui devient une relique sainte, est rougie. Admettre que la nappe est colorée grâce au sang menstruel de femmes (ou si cela est trop pour la communauté locale, avec le sang d’animaux sacrifiés), semble trop offensant pour l’auteur, ou du moins pour la plupart des lecteurs occidentaux que lui et son éditeur visent.

Les pratiques tenues partout en Inde où les gens vivent en accord avec les préceptes du Tantra ou Shakta, vont plus loin que de voir une nappe artificiellement teinte de rouge comme une relique sainte. En fait, les adorateurs du Yoni – hommes et femmes, jeunes et moins jeunes – fabriquent leurs propres reliques saintes avec du sang réel et vivant qui s’écoule d’une femme menstruée. Avec le sang du Yoni d’une femme préalablement consacrée, le prêtre peint un triangle sur son pubis rasé. Une fois cela accompli, un morceau de tissu ou de papier est pressé contre le pubis de la femme, et le triangle s’y imprime. On retrouve ces reliques dans les maisons et les temples secrets des adorateurs, là où ils servent d’objects de méditation et de vénération.

Les Bâuls du Bengal sont un autre groupe de personnes pour lequel les menstruations sont source de joie et de célébration plutôt que de ségrégation, de honte ou de peur. On peut comparer les Bâuls aux ménestrels du Moyen-Âge européen. Leur philosophie comporte des éléments de tradition tantrique et d’hindouïsme. Ils se dévouent particulièrement à la déesse Radha et au dieu Krishna. Les périodes menstruelles sont perçues pour eux comme de bon augure et puissantes, en effet. Ils chantent des chansons d’amour et de dévotion à travers lesquelles ils répandent la parole voulant que la communion avec le Divin puisse être possible grâce au corps – par le rituel, par l’union sexuelle et particulièrement en faisant usage des forces inhérentes au fluide menstruel. Pour cette raison, les Bâuls ne pratiquent que rarement leur rites sexuels en d’autres temps que lors des trois jours et demi de la période menstruelle. Comme on peut s’en attendre d’un peuple dont la tradition est si concentrée sur l’aspect féminin, les Bâuls ont développé des connaissances plutôt accrues concernant les menstruations. Selon leurs enseignements, le fluide menstruel varie selon les différents temps du cycle. Ils associent les types de sang à trois rivières sacrées de la tradition indienne : le Gange, le Saraswati et le Jamuna. «Jamuna, la sombre, s’écoule durant l’état initial des menstruations et est suivie de Saraswati, de fluide rouge, puis de Ganga, dont la couleur du fluide est plus légère. Chaque type de sécrétion menstruel prend 24 heures à se manifester complètement… Lors de la dernière demi-journée, les sécrétions menstruelles déclinent.

Le rituel mensuel des Bâuls, 84 heures remplies de musique, de chanson, de passion et de dévotion, est connue comme étant «la manifestation de la pleine lune au temps de la nouvelle lune», et son but ultime est de «saisir l’insaisissable», l’énergie unique possédée seulement par les femmes. On dit que cette énergie ne se manifeste que durant les 12 dernières heures des menstruations. En s’unissant à une femme menstruée durant cette période, un homme peut recevoir les pouvoirs de la Déesse, partagé à lui grâce à une femme consentante.

Ne bénéficierions-nous tous pas d’une telle manière de voir les femmes et leurs pouvoirs uniques, plutôt que de voir les menstruations comme une malédiction, comme étant impures, ou quelque chose qui doit être caché, parfois même de l’être aimé? Il est certain qu’il ne sera pas aisé, ni peut-être même possible de changer l’opinion de la société en générale en la matière. Ce qui est possible, toutefois, c’est de changer notre propre point de vue et de personnellement défier le tabou qui nous a été imposé par nos parents (qui ne connaissaient pas mieux), par nos pairs et les papes (qui n’ont jamais rien compris aux femmes).

Ce n’est pas seulement dans le Tantra indien que nous pouvons trouver révérence pour les fluides menstruels et leur utilisation dans les rites. De telles pratiques ont également été documentées dans le Tantra tibétain. En dépit du fait que les lamas tibétains contemporains, encore bien plus que les adeptes indiens, sont habituellement assez secrets à propos des aspects sexuels de leurs enseignements, d’autres – dans leur traductions des documents tibétains originaux – se sentent moins gênés. Par exemple, Keith Dowman, dans sa traduction du texte tibétain «Le Secret de la Vie et les Chansons de Dame Yeshe Tsogyal», rapporte un passage qui révèle incontestablement le haut respect qu’avaient les anciens adeptes du Tantrisme envers les pouvoirs du flux menstruel. Dans ce passage, une des co-fondatrices de ce mouvement religieux, l’adepte et enseignante Yeshe Tsogyal (757-817), informe de son extraordinaire vision que voici : «Alors j’ai eu une vision d’une femme rouge, nue, plaquant sa bhaga (yoni) contre ma bouche, et je bois vivement le flux abondant de son sang.»

Dans cette déclaration tirée d’un texte ancien et respecté, non seulement parle-t-on de boire le sang menstruel directement du yoni, mais le texte nous démontre également qu’une telle pratique ne semble pas avoir été restreinte aux couples hétérosexuels, comme on le croirait généralement. Toutefois, il ne faut pas croire pour autant que Yeshe Tsogyal préférait pratiquer ses rituels sexuels avec des femmes plutôt qu’avec des hommes. Dans une biographie, Yeshe Tsogyal écrivit à propos de Padmasambhava (730-805), l’homme à qui l’on doit officiellement d’avoir amené le Tantra et le Boudhisme au Tibet; elle parle clairement de la retraite qu’elle eut avec deux adeptes masculins. Les rituels qu’ils pratiquaient là (comme le faisaient et le font encore plusieurs personnes) sont connus au Tibet sous l’appellation «zap-lam», et comme la «voie de s’étendre sur le corps d’une autre personne», un enseignement qui était surtout transmis par une femme, une initiée du 11e siècle de notre ère, connue au Tibet sous le nom de Vajradhara Niguma et en Inde sous le nom de Yogini Vimalashri.

Ce n’était qu’une brève excursion dans les pratiques du Tantra indien et tibétain concernant les menstruations, et il y aurait encore bien plus à dire sur les différentes pratiques sexuelles et leurs bénéfices psychosomatiques. Le livre «The Yoni» se penche sur l’étude du Yoni et non pas tant sur la sexualité en tant que telle.
0 Commentaires

.: Sang : poème de Shana Grace

2/27/2013

0 Commentaires

 
Traduit et adapté par Ishara Labyris du poème "Blood" de Shana Grace

Mon sang mon sang,
Mon sang est une inondation
Mon sang est une mer en furie
Mon sang est une centaine de chats sifflant
communiant en moi.
Mon ventre est lourd et gonflé
Mon ventre est rond et plein
Mon ventre s'élève avec la mer
La mer est à l'intérieur de moi.
Le rythme de l'océan
rythme de l'eau
Mère lune qui attire les marées
mets-toi à nue au-dessus de ta fille.
J'accouche d'un baume pour la Terre
Il ruisselle le long de mes jambes
Il se mêle à la poussière sur le sol
et s'enfonce dans la terre
J'écris mon nom
riche et rouge
en des cercles sacrés
Où je jure
avec intention et mot sacré
Je signe ma prière
de sang.
Je m'émerveille de son mystère
barbouillé sur mes feuilles blanches
et désire le laisser couler si librement
en ruisseaux qui courent dans la rue.
Mon sang mon sang
Mon sang est une potion
Préparée avec ma véritable émotion
mise à ébullition dans le chaudron de mon ventre
et désenroulement d'un dragon étranglé
luttant contre son noeud étouffant
éclatant dans toute sa furie
Qui ose nier le pouvoir que je possède
dans mes heures de sang ?
Qui ose le réduire en excuses,
"Oh ce n'est que ta période du mois"?
Je ne le traiterai pas comme une malédiction
Je me couronne de sang
Mon droit de naissance
et en bénit cette terre souffrante
qu'elle boive le vin qu'Elle mérite.
Ce sang ne devrait pas être "flushé"
avec autant de dédain
que s'il s'agissait d'une honte déplaisante
que s'il s'agissait d'un ennui fatiguant
Ce sang,
il honore notre création
d'apporter la vie dans la gestation
Il nous lie à la lune,
à la Mer
Soeurs de ces pouvoirs qui sont,
Soeurs de la Sainte Mère
Oserons-nous partager ce trésor...
avec nos Frères?
Ô Qu'il pleuve rouge
Que cela se déverse
Laissez la mer s'élever et rugir
Laissez notre furie courir sa course
vulnérable avec notre force souffrante
Laissez les rivières dans nos utérus
jeter leur bijoux de rubis partout
pour que les rues tournent au rouge
et inondées librement
avec notre sang.
0 Commentaires

.: Le Sacré, le Dangereux et l'Interdit : tabous menstruels en tant que pouvoirs féminins

2/27/2013

0 Commentaires

 
Chapitre 13 du livre Woman in the Shaman’s body de Barbara Tedlock, traduit et adapté par Ishara Labyris

Avec le pouvoir du sang féminin vient une panoplie de croyances qui ont souvent été mal interprétées. Dans plusieurs cultures, les ethnologues ont pu remarquer que les femmes menstruées et le sang féminin étaient considérés « tabou »; elles doivent être évitées afin qu’elles ne contaminent pas les hommes, leurs activités, ou leurs possessions. Mais ces chercheurs n’ont pas su comprendre pleinement ces interdictions; ils n’ont certainement pas compris leurs valeurs positives. Oui, les femmes menstruées peuvent être sujettes à des restrictions, mais elles sont également considérées sacrées et puissantes.

Durant ma formation chamanique au Guatemala, j’ai appris de première main à propos des tabous menstruels. Très tôt dans la formation, Don Andrés et Dona Talin m’ont demandé si j’avais été menstruée durant mes visites aux sanctuaires externes. Heureusement, non. J’ai appris qu’une femme non initiée et menstruée ne doit pas approcher l’encens de copal qui brûle à ces sanctuaires car l’odeur du sang se mêlerait aussitôt avec celui de la fumée et s’élèverait jusqu’aux demeures des ancêtres. Une telle offrande est considérée comme une forme puissante de « nourriture » pour les défunts. Cela ne pouvait être offert que par une femme qui avait formellement été introduite aux ancêtres et en qui on pouvait alors faire confiance, elle continuerait à les nourrir aussi longtemps qu’elle vivrait. Si une femme devait s’engager ainsi pour sa vie et échouait sa formation, et son sang menstruel deviendrait comme un poison pour les ancêtres, qui seraient tués une fois de plus et à jamais.

Le mot « tabou » - signifiant « marqué en profondeur » ou « séparé et interdit au profane à cause de ses pouvoirs sacrés dangereux » - nous vient des îles polynésiennes de Tonga. Là et ailleurs dans le Pacifique, ces concepts du sacré, du dangereux et de l’interdit sont fortement liés.

Aux Marquises, les premières menstruations d’une femme chef étaient appelées à élaborer des tabous célébrant son mana, son pouvoir sacré. Ces rituels étaient aussi importants pour l’autorité des femmes que pouvaient l’être les tabous des hommes à propos de l’art de la guerre pour un chef homme. Aux Fiji, une femme menstruée est appelée « dra tabu », qui signifie « sang sacré » ou « sang interdit ». Son sang menstruel, aussi, est infusé de son mana.

Dans les Grandes Plaines de l’Amérique du Nord, durant les temps de la pré-réservation, les femmes laissaient leurs hommes durant leurs menstruations et s’installaient dans des loges spéciales où elles recherchaient contact avec des êtres spirituels. Les hommes, croyant que le sang menstruel pouvait faire fuir les animaux et affecter le pouvoir de leurs esprits gardiens, se cachaient également dans leur propre loge. Toutefois, ni les femmes ni les hommes ne voyaient les menstruations comme honteuses ou sales; plutôt, elles étaient puissantes, magiques et dangereuses. Une femme menstruée pouvait être taboue, mais elle n’était pas impure.

La Malice du Coyote

Les légendes sur la Création des autochtones d’Amérique révèlent leurs attitudes culturelles à propos des femmes et des menstruations. Plusieurs de ces mythes mettent en scène un héros-escroc connu sous le nom de Coyote. Selon une version datant du début du vingtième siècle, Coyote créa les premières menstruations afin de punir une belle jeune fille pour lui avoir refusé ses faveurs sexuelles.

Nous avons choisi cette histoire – rapportée par l’anthropologue Alfred Kroeber d’une femme chamane Yurok en Californie – lorsque la jeune fille repousse les avances sexuelles outrageuses du Vieil Homme Coyote.

Elle le rejeta et Coyote devint si en colère qu’il alla voir Pulekukwerek [le héros culturel] et lui dit : « Je crois [qu’il serait] mieux qu’une femme ait des fleurs. Lorsqu’elle les aura, elle verra du sang. »

La divinité était d’accord avec Coyote et se coupa à la cheville. Puis, il éclaboussa son sang sur les cuisses de la jeune fille.

« Tu as des fleurs maintenant », lui dit Coyote.

« Non! » cria la jeune fille.

« Oui, je vois du sang sur tes jambes », insista Coyote.

Puis, comme Coyote commençait à énumérer une panoplie de tabous, Femme Ciel parla depuis le milieu des cieux et dit :

« Nous sommes ici dans le ciel, nous les femmes, qui fleurissons. Nous n’en sommes pas effrayées, car nous possédons la médecine pour cela. Maintenant, regarde vers l’amont. Je m’y lave moi-même. Maintenant, regarde au milieu du lac dans le ciel, tu peux voir combien de sentiers mènent à ce lac. Maintenant, regarde où je me trouve. Tu peux voir du sang autour de moi parce que je suis ainsi maintenant. Je suis en fleurs. J’irai dans le lac et je m’y laverai, et ainsi j’obtiendrai bonne fortune. Dis-lui que je me lave dans le ciel. »

En dépit des actions du Coyote, Femme-Ciel enseigne à la jeune fille de ne pas avoir peur de son saignement, mais de le voir comme de magnifiques fleurs.

Une femme d’une autre culture indienne de Californie a récemment raconté au chaman Tela Star Hawk Lake une histoire un peu différente à propos de l’origine des menstruations.

Un jour, il y a fort longtemps, Vieil homme Coyote était partit chasser avec son arc et sa flèche. Il vit quelques jeunes femmes superbes assemblées pour ramasser des herbes près d’un étang. « Peut-être les viserai-je de mes flèches pour qu’elles s’en aillent » se disait-il à lui-même.

Tu vois, il voulait qu’elles s’enfuissent afin d’observer si leurs seins et leurs hanches étaient bien développés. Il chanta sa chanson d’amour et prétendit qu’il voulait les tirer. Et cela l’amusait beaucoup. Puis, il tomba soudainement sur le sol et une de ses flèches se décocha, heurtant une des jeunes filles à l’entrejambe. Elle tomba sur le sol, saignant et pleurant.

Les femmes plus âgées accoururent vers elle et crièrent jusqu’à s’époumoner pour chasser Coyote.

Il devint furieux et dit : »Vous ne pouvez pas me parler de cette façon! Je vais vous montrer tout le pouvoir que je détiens! Je jette une malédiction sur toutes les jeunes femmes! À partir de ce jour et à jamais, les filles de cet âge saigneront, seront apeurées et deviendront malades. »

Mais les femmes plus âgées avaient également un pouvoir et voulurent soigner la jeune fille. D’abord, elles amassèrent du saule près du ruisseau et construisirent une loge spéciale, similaire à la loge de sudation des hommes. Elles entrèrent à l’intérieur et chantèrent, dansèrent et prièrent au-dessus de la jeune fille, demandant à Grand-Mère Lune de la guérir. Elles lui donnèrent la médecine des herbes et des fleurs, lui apprirent comment contempler, méditer et apprendre de ses rêves.

C’est ainsi que les femmes-médecine changèrent la malédiction des menstruations de Coyote en Bénédiction de la Femme-Médecine.

Le psychanalyste Carl Jung décrivait Coyote comme une « figure d’ombre collective » asexuelle, la quintessence de tous les traits de caractère inférieurs en tous les individus. Son analyse minimise le genre du Coyote ultra-masculin, qui est représenté dans ces mythes, d’abord comme le héros d’une culture de qui proviennent les menstruations, ensuite comme un fou qui le fait accidentellement. Dans les deux cas, les femmes le surpassent, en tournant ses tabous menstruels en rites de puberté et sa malédiction en bénédiction menstruelle.

La différence entre les attitudes des hommes et celles des femmes envers les menstruations est également mise en lumière dans d’autres traditions autochtones d’Amérique. Dans la mythologie Cri, on croyait que le maïs poussait parce que la mère primordiale frottait ses jambes une fois par mois, ce qui faisait couler son sang comme de la bouillie de maïs. Depuis lors, les rayons masculins du soleil luttent pour sortir de cette abondance d’eau menstruelle féminine. Une telle métaphore suggère que pour encourager la croissance de la nourriture, les hommes doivent se séparer des femmes chaque mois. Les hommes cris ont le dédain de l’odeur du sang menstruel, et croient que ça indique une femme dangereuse ou incontrôlable qui peut ruiner leurs habiletés à chasser et leur santé. Les femmes cris, quant à elles, croient que le flux menstruel leur donnent pouvoir et ainsi force une séparation des sexes. Historiquement, les femmes vivaient à part des hommes durant le temps des menstruations, mangeaient avec une autre vaisselle que celle des hommes, et s’asseyaient sur différents tapis. Les hommes et les femmes contemporains dormaient dans des chambres différentes, ou quand la température le permettait, les hommes dormaient à l’extérieur sous un abri. Si une famille négligeait ces règlements, on croyait que les hommes risquaient alors d’attraper un certain nombre de maladies, incluant le diabète, le cancer, le rhumatisme ou risquait de faire un AVC.

Les femmes menstruées sont représentées dans plusieurs cultures comme des déesses donneuses de vie ou comme des démons polluants. Parfois, un peu des deux. La vision négative se retrouve plus souvent là où un clergé hiérarchique masculin contrôle étroitement l’idéologie religieuse. La pratique hindoue du tantra inclue des rituels où l’on vénère le cycle menstruel; dans le courant de l’hindouisme sanskritique, toutefois, ces rituels sont considérés comme polluants. Dans le Shinto japonais – où les dirigeants religieux sont surtout féminins – les femmes menstruées sont reconnues pour représenter le divin féminin. Le bouddhisme clérical pratiqué au Japon, en Chine, au Tibet et en Inde – où les prêtres sont presque tous masculins – déclare que les femmes menstruées sont sales.

La honte, la peur et l’envie des menstruations

Des générations de chercheurs en sciences sociales ont accordé plus d’attention aux paroles et actions des hommes plutôt que celles des femmes. Par conséquent, les archives ethnographiques débordent des descriptions de la peur de l’homme, de son dégoût et de sa colère à propos des femmes menstruées. Les femmes ethnographes peuvent avoir de la difficulté à accepter ces attitudes, mais parce qu’elles parce qu’elles se permettent de devenir des « males honoraires » pour les sociétés dans lesquelles elles étudient, leurs points de vues peuvent être influencés.

Ruth Landes, dans son classique « La femme Ojibwa » (1938) laisse son dégoût pour les menstruations affecter tout ce qu’elle voit. Elle décrit les premières menstruations parmi les Ojibwe comme étant un temps où la jeune fille est une menace pour elle-même. Elle déclare également que la quête de vision d’une fille n’importe culturellement pas. « Alors que la quête de vision du jeune homme pubère est un effort rempli d’espoir vers l’élargissement de ses horizons, la quête de la jeune fille pubère est quant à elle un retrait de conscience de son Soi malin. »

Une autre ethnographe, Ruth Underhill, a admis qu’elle avait un problème à comprendre et à accepter les tabous menstruels. Elle avait demandé à une femme Tohono O’odham (Papago) qu’allait-on faire pendant son absence : « Cela ne vous dérange pas d’être envoyée en dehors de votre maison? » La femme avait ri et lui avait répondu « Me déranger! Pourquoi? Ce sont des vacances, pour nous les femmes. Pas de travail à faire, quand bien même les hommes le voudraient ». Underhill insista, toutefois : « Cela ne vous dérange pas –hum- que les gens sachent [que vous êtes menstruée]? » La femme était vraiment amusée. « Pourquoi le devrions-nous?, lui répondit-elle. « C’est le moment où nous sommes le plus puissantes et les hommes sont effrayés.  Nous aimons les voir passer furtivement, le dos tourné. »

En montrant son propre embarras, et en recevant les réponses claires de cette femme face à ses questions stupides, Underhill fournit une histoire mémorable pour démontrer la sensibilité interculturelle. Le malaise que tant de femmes occidentales ressentent à propos de leur cycle menstruel résulte d’une combinaison des sentiments masculins et des sanctions religieuses.

Dans la tradition chrétienne, la malédiction menstruelle et la douleur de l’enfantement sont l’héritage de la désobéissance d’Ève dans le Jardin d’Éden. En mangeant le fruit de la connaissance, offert par le serpent, apporta ces punitions à toutes les femmes mortelles. Jusqu’à ce jour, le sang menstruel est encore considéré comme impur par l’Église catholique romaine. Une raison pour laquelle les pères de l’Église refusent de permettre l’ordination des femmes en tant que prêtres est que leur sang utérin polluerait l’autel sacré.

Dans la tradition juive, aussi, les menstruations sont le résultat des actions d’Ève dans le Jardin d’Éden. La femme menstruée, appelée niddah en hébreu, doit suivre un code légal spécifique lui interdisant d’avoir des relations sexuelles. Chaque mois, elle compte cinq jours de menstruation, et y ajoute sept jours de pureté, durant lesquels elle plonge son corps dans la mikvah, un bain rituel. La loi Talmudique stipule que s’il est permit à une femme de cohabiter avec son époux après le bain, au huitième jour, il ne lui est pas permis de prendre ce bain durant le Sabbat, même si c’est son huitième jour. 

Dans la société occidentale, les femmes cachent leur saignement menstruel dans leur langage – par des euphémismes – et en pratique. Les études ont démontré que plusieurs jeunes femmes cachent leurs premières menstruations à leurs mères et partagent leurs expériences avec d’autres jeunes femmes seulement après une certaine période de temps. La psychologue Melanie Klein pense que ces filles agissent ainsi parce qu’elles associent inconsciemment le sang menstruel avec l’urine et les matières fécales, donc, avec la contamination.

Il y a aussi eu une raison sociétale pour laquelle les femmes minimisent leurs cycles menstruels : au tout début de la révolution industrielle, les hommes doutaient que les femmes dans la main-d’œuvre pouvaient être capables d’effectuer leurs tâches jour après jour. Les réformateurs sociaux embauchèrent des chercheurs pour prouver que les femmes pouvaient effectuer leur travail lorsqu’elles étaient menstruées aussi aisément que lorsqu’elles ne l’étaient pas. Ils conclurent que les femmes ne démontraient aucune inefficacité dans les travaux manuels ou dans les associations de mots durant leurs menstruations. Des études plus récentes révèlent quelque chose de légèrement différent : évidemment, l’habileté pour la routine physique diminuait quelque peu, mais la pensée créative and la résolution de problèmes s’amélioraient vraiment peu avant et pendant les menstruations.

Les psychanalystes ont contribué à répandre le sentiment de honte pour les menstruations. Sigmund Freud, qui avait de façon générale dédain de la femme, réduisait toutes inclinations ésotériques en désir enfantin de retourner à l’utérus « océanique ». Bruno Bettelheim, toutefois, suggère que l’hostilité entre hommes et femmes, qui résulte fréquemment du dégoût envers les menstruations, est profondément lié à la jalousie du vagin et de l’utérus.

Le résultat global est que pendant trop longtemps les femmes occidentales ont eu à s’excuser pour leur sang féminin. Il est temps pour les femmes d’embrasser cette différente; ensuite seulement les hommes pourront-ils apprendre à respecter le pouvoir des menstruations.

La fierté féminine des menstruations

La honte entourant les menstruations qui semblent faire partie de la société Occidentale est une guerre culturelle contre la nature. Des membres de d’autres traditions nous pouvons entendre encore et encore les vertus du sang féminin et la réclusion lors des règles. Philip Deere, un saint homme Muskogee de l’Oklahoma, l’exprimait de cette façon : « La femme est pareille à l’homme – mais à un certain âge elle change  pour un autre stade de la vie. Durant ce stade, elle se purifie naturellement elle-même chaque mois. Durant ce temps mensuel, les femmes se séparent des hommes. Les hommes doivent prendre un bain de vapeur pour se purifier, une fois par moi, alors que les femmes se purifient naturellement pour garder leur médecine effective.

De même, les femmes Aymara vivant près du Lac Titicaca, en Bolivie et au Pérou, croient que les menstruations nettoient et renforcent leur spiritualité. Les ethnologues ont décrit ces femmes, qui ont voyagé partout à travers les Andes pour pratiquer leurs habiletés shamaniques guérisseuses, sont plus puissantes que les hommes guérisseurs. De l’avis de ces femmes, le flux mensuel du sang les purifie et les renforce, les rendant spécialement efficaces pour la guérison de problèmes reproducteurs comme la stérilité et l’infertilité, ou autres problèmes comme le trouble entre amants.

Dans les sociétés où les femmes sont perçues comme une menace pour les hommes, les rituels de menstruation masculine ont été développés peut-être pour partager le pouvoir féminin. Les hommes mélanésiens, par exemple, croient avec ferveur que tout contact avec des substances féminines – surtout le sang menstruel – est dangereux. Cependant, ils envient les femmes, qui sont libres de toute « contamination » grâce à leurs menstruations. Pour compenser, ils ont inventé les saignées rituelles, qui imitent l’écoulement de sang mensuel des femmes. À partir de la puberté jusqu’à la fin de leur vie, les hommes provoquent le saignement de leur nez ou de leurs organes génitaux.

En Australie, les hommes aborigènes étaient traditionnellement circoncis durant les cérémonies de puberté lors desquelles les adultes, femmes et hommes, participent. Au début du rituel, les jeunes hommes sont barbouillés de sang menstruel, et un trou en forme d’utérus est préparé dans le sol. Un par un, les jeunes hommes sont placés dans la cavité et on leur dit que Kawardi, la « mère de tous », les avalera et les régurgitera – qu’ils mourront et renaîtront. Pendant ce temps, le bruit d’un rhombe (une planche attachée à une corde, basculée rapidement en cercles au-dessus de la tête) imite la voix de Kawardi.

Quelques années plus tard, ces mêmes jeunes hommes étaient circoncis. C’était une opération douloureuse durant laquelle on utilisait un couteau pour couper la surface ventrale du pénis sur toute sa longueur; ainsi, ils avaient un vagin symbolique. La dernière étape de leur initiation consistait à être avalés et régurgités par Julunggul, le serpent arc-en-ciel. Ils rampaient ensuite entre les jambes de leurs initiateurs et renaissaient androgynes de cet utérus collectif masculin. À partir de ce moment, une fois tous les mois, la blessure de leur pénis était rouverte grâce à une épine; la combinaison du flux sanguin et du sperme étaient relâchés comme étant l’essence vitale de vie.

Selon l’ethnologue anglais Ashley Montagu, la subincision étaient considérée valable parce qu’elle permettait aux hommes de menstruer et ainsi se débarrasser du « mauvais sang » qui résultait des relations sexuelles et des activités dangereuses. Les femmes perdaient ce sang naturellement avec les menstruations, alors que les hommes avaient à agir pour obtenir le même résultat.

Durant les rites de puberté des jeunes hommes Wogeo en Nouvelle-Guinée, les langues des initiés étaient coupées afin de les débarrasser du sang de leurs mères, transmis lors de l’accouchement. Cette saignée rituelle ou imitation des menstruations, devaient rendre les langues de ces hommes plus souples pour les aider à jouer de la flûte sacrée. Les cérémonies avaient lieu à la nouvelle lune, alors que les jeunes filles quittaient le village pour leur période de réclusion menstruelle.

Pour une personne née et élevée dans une société où les réalisations des hommes sont exaltées et où le rôle des femmes est déprécié, ces émulations du sang féminin peut paraître bizarre ou arriéré. Après tout, les femmes de la société occidentale, supposément créées à partir de la côte d’Adam, s’efforcent d’imiter les hommes. Dans la culture de la Nouvelle-Guinée, toutefois, où les hommes craignent l’habileté des femmes à donner la vie, ce sont eux qui essaient d’imiter le pouvoir supérieur des femmes.

Couvade

Rien n’incarne la force de vie reproductrice féminine aussi bien que la grossesse elle-même, et à certains endroits dans le monde, les hommes souhaitaient partager ce pouvoir en pratiquant certaines précautions appelées couvade. Cette tradition a d’abord été remarquée chez les Basques et le nom provient du français « couver ». Après avoir accouché, une femme retournait à ses corvées, pendant que son époux s’étend sur le lit pour recouvrer ses forces.

La couvade a été illustrée au seizième siècle, dans la peinture de l’Espagne coloniale. Et selon la tradition celtique, chaque fois qu’une reine fée donnait naissance, son époux, aussi, se couchait dans le lit pour partager sa douleur. Quelques peuples ruraux de descendance celtique vivant en France, en Allemagne et dans les Îles Britanniques ont conservé cette coutume. Au Canada, où les Celtes se seraient mariés avec des autochtones, cette tradition est honorée en mythe, rituel et occasionnellement en pratique. Les Tupinamba du Brésil et des Quichua de l’Équateur suivaient une coutume similaire : l’époux d’une femme qui venait de donner la vie portait les vêtements de sa femme, couché dans son hamac, recevant des félicitations de ses proches. Pendant ce temps, sa femme était debout, nettoyait et préparait à manger.

À l’époque médiévale, les Européens croyaient que la douleur physique et la souffrance pouvaient être partagées par l’échange des vêtements. Une femme en couche portait un des habits de son époux; l’homme revêtait l’une de ses robes et se roulait sur le sol en gémissant. Dans certaines communautés de l’Inde, les hommes portent les saris de leur femme durant l’accouchement afin de transférer la douleur à eux-mêmes. Ces rituels ont été interprétés de plusieurs façons – comme étant l’expérience indirecte de l’accouchement par l’homme, comme une forme d’émasculation et de soumission ou comme une réaction jalouse venant du fait que les hommes ne peuvent pas donner naissance.

Les deux époux de certaines sociétés indigènes pratiquent ensemble des rituels post-partum. Chez les Wayapì de l’Amérique du Sud d’aujourd’hui, les nouveaux parents prennent des précautions élaborées relativement à ce qu’ils mangent et à où ils vont. Les peuples indigènes de Californie avaient un ensemble de restrictions parentales similaire appelé par les ethnologues « la semi-couvade ». Là, le couple était considéré physiquement comme un; l’homme, plutôt que de se sentir blessé par le pouvoir de la femme, le partageait. Il abandonnait ses activités masculines comme la pêche et les jeux d’argent, se retirait des autres et il gardait sa propre sécurité, comme le faisait son épouse. Toutefois, plutôt que de se reposer durant sa couvade, il s’occupait des tâches féminines, comme celle d’aller amasser le bois pour le feu. Il prenait un bain tous les jours et avait un homme pour s’occuper de lui, tout comme sa femme avait sa sage-femme pour prendre soin d’elle. Un homme qui s’identifiait beaucoup à l’expérience de grossesse que vivait sa femme pouvait développer des symptômes de grossesse, comme la léthargie et les nausées. Puis, il pouvait aussi gagner son lit au moment de la naissance. Lorsque sa femme criait pour pousser l’enfant vers le monde, lui, aussi, en ressentirait les douleurs.

Parfois, la couvade causait de la douleur physique. Dans le nord de la Californie, les hommes autochtones se retiraient dans un autre bâtiment que celui où leur femme allait avoir l’enfant. Ils restaient solitaires, ne se nourrissaient que de soupe de gland de chêne, et faisait appel au monde des esprits afin de recevoir de l’aide pour l’accouchement. De cette façon, lorsque la femme souffrait, son époux souffrait également. Lorsqu’elle saignait, il se coupait lui-même avec une pointe de silex pour prendre un part de sa douleur.

Selon la tradition Huichol, lorsqu’une femme donnait naissance à son premier enfant, son époux devait s’accroupir directement au-dessus d’elle, des cordes attachées à ses testicules. Lorsque la femme entrait en travail, elle s’accrochait vigoureusement aux cordes et son époux partageait ainsi l’expérience douloureuse, mais ultimement heureuse, de la naissance.

Un rituel similaire avait lieu en Estonie. L’époux s’asseyait sur une haute plateforme, ses testicules attachés à une corde qui tombait dans le lit de sa femme en couche. Chaque fois que sa femme gémissait, sa sage-femme tirait fort sur la corde, provoquant les cris de l’époux. L’idée derrière ce rituel était de transférer un peu de la douleur génitale au père afin qu’il puisse compatir et encourager sa femme.

Voies shamaniques féminines

La plupart des étudiants en chamanisme ont suivi Mircea Eliade, portant leur attention surtout sur les voies shamaniques masculines – démembrement, éviscération et mort symbolique conduisant à la renaissance – comme s’il s’agissait d’une initiation shamanique nécessaire. Les femmes qui suivent les voies féminines portent leur attention sur la naissance : elles reçoivent leur appel shamanique durant leurs ménarches (premières menstruations) ou durant leur grossesse et sont symboliquement nées dans la profession. Dans de nombreuses traditions de Sibérie, de l’Asie du Sud-est et de Chine, les femmes shamanes ne servaient pas seulement de sages-femmes pour leurs communautés mais durant leurs séances attachaient des cordes au plafond afin d’amadouer leurs esprits-guides pour qu’ils descendent dans leurs corps, avant de commencer leur travail shamanique.

La croyance judéo-chrétienne a dépeint les menstruations comme une forme de punition ou de souillure plutôt qu’un temps pour l’éveil spirituel et de purification naturelle. Des attitudes anti-menstruelles ont tordu notre compréhension du pouvoir du sang menstruel et des célébrations organisées et conduites par les femmes menstruées. Le retrait des femmes de certains endroits spéciaux lors de leurs règles a été interprété comme un signe de la dégradation des femmes plutôt que de représenter les aspects positifs de la réclusion. Pour vraiment comprendre le potentiel guérisseur du sang des femmes, nous devons porter une attention particulière aux traditions dans lesquelles les femmes pratiquent comme shamanes.

Les femmes d’aujourd’hui, indépendamment de leurs affiliations ethniques et religieuses, pourraient développer des rituels pour célébrer leur divin féminin et leurs menstruations. Durant cette période spéciale, elles pourraient faire des pèlerinages jusqu’à des endroits sacrés pour s’harmoniser avec leur biorythmes naturels et leur courant menstruel. En se libérant elles-mêmes de l’idée dommageable qui veut que les menstruations soient une « pollution » ou une « malédiction », et en réalisant des rituels pour leurs temps de lunes, cela encouragerait leurs pouvoirs intuitifs et spirituels, et elles seraient ainsi plus fortes dans plusieurs autres aspects de leurs vies.

Avec l’entrée récente des femmes dans des rôles de leadership dans les rabbinats Conservateurs ou de la Réforme, les femmes juives peuvent maintenant se joindre aux groupes Rosh Hodesh pour célébrer la nouvelle lune et pratiquer la guérison spirituelle. Plusieurs des femmes impliquées dans ce mouvement sentent que ces célébrations lient la lune à leurs cycles menstruels.

Les femmes du mouvement spirituel de la Déesse rassemblent leur sang menstruel et l’utilisent pour nourrir les plantes de la maison, ou pour peindre une toile qu’elles montrent publiquement. Ces activités sont contraires à la vision des menstruations comme étant la « malédiction d’Êve ». Plutôt que de les voir comme quelque chose d’embarrassant, de dégoûtant, comme un fléau pour les femmes, le sang menstruel devient une forme matérielle d’énergie subtile – propre, belle, créative et puissante – et c’est ce qu’il est.

Sans doute, la leçon la plus basique de toutes est que les femmes peuvent atteindre des états de conscience mystiques – et servir de guérisseuses shamaniques – en considérant leurs corps et leurs fluides corporels comme étant intégraux à leur spiritualité et non comme des obstacles envers celle-ci. Lorsque le sang féminin est senti comme une matérialisation de l’énergie vitale, les menstruations donnent aux femmes une voie spéciale vers la compréhension et la guérison spirituelles.
0 Commentaires

.: Le Sabbat des femmes

2/27/2013

0 Commentaires

 
The Sabbath of Women, par Lara Owen
Traduit par Ishara Labyris, et publié avec la généreuse autorisation de l'auteure

Autrefois, je pensais que mes règles étaient une nuisance, une intrusion malpropre qui augmentait la quantité de vêtements à laver et qui causait une panoplie de symptômes déplaisants, comme l'épuisement et des douleurs débilitantes. Mes menstruations interféraient avec ma vie sexuelle, mes activités sportives et mon niveau d'énergie. Elles causaient des sautes d'humeurs flagrantes, de l'irritabilité, de la chiennerie destructive et imparable. Cela me coûtait de l'argent - dépensé dans les serviettes et les tampons pour éponger le sang, en vêtements ruinés, en temps non-payé à la maison. Mes règles étaient un saboteur sournois et méchant, qui arrivait toujours au moment le plus inopportun.

En dépit de ce catéchisme de malheur, je n'étais pas tout à fait contre. Lorsque j'avais mes règles, il y avait toujours une part de moi qui en était contente. Cela signifiait que j'étais en santé et fertile, et que tout fonctionnait normalement. Il y avait un sentiment de fierté à propos de ce saignement, que j'ai ressenti très fortement lors de mes toutes premières menstruations, mais, en l'absence de tout encouragement externe, ce sentiment de plaisir s'est vite volatilisé.

Une amie à moi, qui est juive, m'a raconté que lorsqu'elle a eu ses premières règles, sa mère l'a frappée au visage. Choquée, elle lui a demandé "Pourquoi m'as-tu fait ça?" et sa mère a répondu : "Je ne sais pas, ma mère me l'a fait. C'est la tradition".

Être frappée en plein visage lorsque vous devenez une femme - c'est une manière intéressante pour démontrer comment le fait de devenir femme est considéré. Sans doute ce geste était-il destiné à éliminer tout sentiment de fierté qui pouvait accompagner le premier sang.

Quelque chose d'autre m'enleva tout sentiment de fierté quant à moi, et je crois que c'est l'absence de cérémonie. Il m'avait semblé, au fond de moi, que quelque chose de fascinant et de magique était entrain de m'arriver, bien que tout le monde autour de moi traitait la chose comme anodine. Je ressentais un sentiment d'accomplissement, mêlé d'excitation, de curiosité, d'embarras; je me souviens aussi une vague conscience d'un avenir inconnu et béant. Intuitivement, je savais qu'il s'agissait d'un événement marquant dans ma vie, et pourtant personne ne m'a dit quoique ce soit, sinon me donner des serviettes hygiéniques. Je pense que ma mère était contente malgré tout, cela signifiait que j'étais en santé et que je grandissais normalement, mais j'avais besoin de plus que ça. J'avais besoin d'une cérémonie, d'une fête, quelque reconnaissance publique joyeuse pour ce grand événement de mon développement. Mais rien n'est venu. Alors que les mois défilaient, je ressentais de plus en plus la honte et l'embarras, et de moins en moins de la fierté que j'avais ressentie lors de mon premier saignement.

À la maison, mes règles étaient quelque chose que je devais garder secrète par rapport à mon père et à mes frères. Si j'avais à en parler, je devais le faire en chuchotant, et préférablement face à face avec ma mère. Peu de temps après mes premières règles, nous allions faire un voyage en famille, et j'ai eu à demander à mon père d'arrêter la voiture pour que je puisse aller à la pharmacie. Bien entendu, il voulait savoir ce que j'avais besoin d'acheter. Je me souviens de ce sentiment horrible lorsque je lui ai dit que je devais acheter des serviettes hygiéniques. C'était un mélange de honte, de fierté et de total embarras. Il a été gentil à ce propos, et aussi loin que je me souvienne, n'a jamais rien dit qui aurait pu me faire sentir qu'il y avait de quoi avoir honte, mais j'avais toujours cette honte dans mes pensées, qui colorait toutes relations que j'avais avec les gens.

À l'école, les menstruations n'étaient pas un sujet de discussion, sinon dans un cours de biologie. Toutes les informations que j'ai reçues à propos des menstruations étaient purement physiques. Vous avez des règles parce que vous n'êtes pas encore enceintes et que le flux menstruel est seulement le liquide rejeté par l'utérus, qui devait servir au fœtus potentiel. Mes amies et moi discutions de cela, et en l'absence de d'autres informations, conclurent que le corps féminin était pauvrement évolué - tout ce sang et cette agitation pendant des années et des années, tout cela aurait pu n'arriver qu'une fois ou deux, dans le désir d'avoir des enfants.

L'image que la société renvoyait à travers la publicité était pour moi source de confusion. Les annonces montraient des filles souples en bikini courant joyeusement vers l'océan, et des filles en jeans serrés blancs sautant sur des chevaux. Cela ne cadrait pas vraiment avec ma propre expérience de léthargie et de crampes. Je savais que personne droit d'esprit ne ferait autant confiance au tampon, au point de sortir en jeans blanc. Pah ! Ce devaient être des hommes qui avaient écrit cette pub.

Malgré tout, je sentais que je devais être comme ces filles de publicité pour Tampax, que la façon dont mon corps et mon esprit se comportaient était erronée, qu'une jeune fille normale ne devrait pas se sentir différente lorsqu'elle a ses règles. Il n'y a rien qu'une jeune fille normale n'aimerait plus que de monter sur un cheval et galoper vers de nouvelles aventures, pendant que ce gentil petit tampon lui permet d'oublier complètement qu'elle a ses règles. L'embarrassante vérité était que je ne pouvais même pas insérer un tampon en moi. Ce n'était pas seulement parce que je ne m'assimilais pas au stéréotype, j'échouais également avec l'équipement. Je me sentais nettement incapable, jusqu'à ce qu'enfin je réussisse. Puis, débuta le processus d'imaginer que je n'étais pas entrain de saigner du tout.

Je considérais mes règles comme un inconvénient et c'était tout. Si elles étaient douloureuses, je prenais des analgésiques - en l'occurrence Feminax, puissant mélange d'ingrédients destinés à effacer tous les symptômes menstruels, incluant de la caféine pour venir à bout de la dépression et de la léthargie. Lorsque j'allais faire des examens gynécologiques, je demandais des médicaments au médecin afin de repousser mes règles à un moment plus approprié, lorsque que je considérerais que la rage des hormones méconnues pourrait attaquer mon cerveau gauche, sans affecter mon avenir académique. Personne ne m'avait jamais parlé qu'il pouvait y avoir quelque chose d'utile à expérimenter un puissant état de conscience diffuse une fois par mois, et cela parce que personne ne le savait.

Lorsque j'eus dix-huit ans, je pris la pilule et j'étais initialement contente que mes règles étaient devenues prévisibles et beaucoup plus légères. Pendant quelques années, elles coulèrent légèrement ainsi, et cela parce que, en fait, ce n'était pas de vraies règles du tout. Je remarquai que je devenais de plus en plus émotionnelle et bouleversée durant messupposées règles, et je décidai d'arrêter la pilule. Après quelques mois à me sentir "moi-même" à nouveau, j'ai réalisé que même sans la pilule, je me sentais trahie parce que mes règles étaient encore tellement légères. C'est là que j'ai réalisé que pour moi, les menstruations étaient une part importante de ma vie, un rythme sur lequel dépendait ma santé psychique et physique, que j'ignorais et tentais d'enlever à mes risques.

Dans d'autres cultures, plutôt que d'être ignorées, les menstruations ont été, et dans certains cas sont encore, vues comme un temps spécial et sacré pour les femmes. L'abondance des symboles féminins trouvés dans d'anciens sites d'Europe et du Moyen Orient suggèrent fortement que ces cultures étaient matrifocales, et qu'elles honoraient la Déesse et les processus du corps féminin. Les pratiques rituelles étaient liées au saignement mensuel des femmes, et le sang menstruel lui-même était hautement considéré comme possédant un pouvoir magique. Le mot rituel provient de rtu, mot Sanskri signifiant "menstrues". Avant que n'apparaissent les sacrifices d'êtres vivants, c'était le sang menstruel qu'on offrait durant les cérémonies. Le sang menstruel était sacré pour les Celtes, les anciens Égyptiens, les Maoris, les premiers Taoïstes, les Tantristes et les Gnostiques.

Les autochtones d'Amérique comprenaient très bien les différents sentiments que les femmes avaient lorsqu'elles étaient menstruées - et pour eux, ces sentiments faisaient partie de quelque chose de très significatif pour les cycles du corps de la femme. Les femmes se retiraient dans une hutte menstruelle pour y passer le temps durant leur saignement. Ce temps était considéré comme le point culminant du pouvoir spirituel d'une femme, et l'activité la plus appropriée à faire était de se reposer et de rassembler leur sagesse.

En 1986, je rencontrai un enseignant des traditions autochtones d'Amérique. Il m'enseigna qu'une femme menstruée avait le potentiel d'être plus puissante psychiquement et spirituellement qu'aucune autre personne, soit-elle masculine ou féminine, et ce à tout moment. Cela renversa ma vision préconditionnée de la réalité. J'avais toujours considéré mes règles comme un moment de faiblesse et de difficulté - de quoi cet homme était-il entrain de me parler ?

Il m'a dit de creuser un trou dans le sol et, au-dessus, de parler de mes pensées négatives à propos de la féminité, à propos du sang menstruel. Il m'a dit que la terre transformerait cette énergie négative que j'avais de ma nature féminine. Je me sentais assez folle de faire cela, mais je l'ai fait quand même, et j'étais amusée de découvrir tous les mauvais sentiments que j'entretenais en moi, sur le fait d'être femme, surtout que je me considérais comme quelqu'un de très féministe. Cet exercice a été douloureux, mais très effectif.

J'ai commencé à voir mon sang avec une certaine nuance de respect, plutôt que de la peur, du dégoût ou de l'indifférence. À ce moment, je n'utilisais plus de tampons, j'observais alors adéquatement mon sang chaque mois, plutôt que de le voir sur un vieux tampon dégoûtant. J'ai vu qu'il était clair et rouge, et parfois plus sombre et coagulé. Si j'avais vraiment libéré ma vision, j'aurais pu voir que c'était plein de vie, plein de magie, plein de potentiel. Je commençais à ressentir un frisson de joie lorsque je pensais à mes saignements, à propos du fait d'être une femme, qu'il y avait quelque chose, après tout, d'extraordinairement magique et mystérieux habitant le corps féminin. Le ressentiment que j'avais d'être une femme, à mon adolescence et au début de la vingtaine, le sentiment que les gars avaient de meilleures conditions, tout cela disparu et fut remplacé par un sentiment grandissant d'émerveillement devant les complexités et la profondeur offerts par le cycle menstruel.

Je commençai à prendre le temps de me reposer et de méditer, de juste être avec moi-même durant mes règles. J'ai trouvé qu'il s'agissait d'un temps où j'étais particulièrement introspective, et que cette introspection était d'une nature intemporelle. Je sentais que je puisais dans une source vaste et ancienne de sagesse féminine - simplement en m'asseyant et en prenant le temps d'écouter, alors que je saignais. En prenant ce temps, je créais une relation toute différente avec mon propre corps. Ma santé s'en trouvait améliorée et graduellement les crampes que j'avais eues toute ma vie s'étaient vues diminuées et mes règles étaient devenues un temps de plaisir plutôt que de souffrance.

J'en suis venue à vraiment m'apprécier moi-même. Bien sûr, vous ne pouvez pas forcer l'amour envers vous-même, tout comme vous ne pouvez pas forcer personne à vous aimer. Cela arrive, très graduellement, et plusieurs personnes apparurent dans ma vie et m'aidèrent à me percevoir plus clairement. Mais le plus important au départ c'était de savoir que les menstruations sont la source du pouvoir. Cette information inestimable, associée au fort instinct que j'avais de considérer le pouvoir de l'utérus, transforma profondément et largement le non-respect que j'avais de moi-même, en grande partie inconsciemment.

La pensée que les menstruations sont une source de pouvoir pour les femmes allait complètement à l'opposé de ce qu'on m'avait conditionnée à penser, et pourtant je savais dans mon cœur que c'était vrai. Je réalisai que dans la dichotomie existant entre ce que notre culture nous enseigne et ma réaction audacieuse de "Oui, bien sûr!" à cette ancienne sagesse, il y avait beaucoup d'énergie. Où vous trouvez les endroits où une culture se dissocie d'une vérité naturelle vous trouvez une clé, une voie à travers les maladies d'une culture. J'ai commencé à comprendre que la séparation entre, d'une part, la sagesse et le pouvoir lié aux menstruations que je percevais, et d'autre part, les attitudes de la société moderne envers l'utérus, était au cœur de la soumission et du déni de la réalité et l'expérience féminine.

Pour plusieurs femmes, la racine de leur malheur repose sous une relation douloureuse avec leur féminité. Les femmes sont entraînées à cacher le fait qu'elles sont menstruées et ce, à tout prix. Les taches de sang sur les vêtements sont d'un hideux embarras. Personne ne dit jamais qu'elle n'ira pas travailler aujourd'hui ou qu'elle n'ira pas à telle fête parce qu'elle a ses règles, pas plus qu'elle dira qu'elle en souffre, elle dira plutôt qu'elle a mal à la tête ou qu'elle a des problèmes de digestion.

Lorsque les menstruations et l'utérus sont vus bêtement comme une nécessité biologique inconfortable, l'estime d'une femme en elle-même est forcément au plus bas. Nous sommes des êtres spirituels vivant dans des corps physiques, c'est vrai, mais lorsque nous sommes incarnés, nous sommes nos corps et nous ne pouvons plonger dans les profondeurs de notre cœur et aimer si nous n'aimons pas nos propres corps. Et nous n'aimons pas notre corps si nous nous prenons à nous exclamer : "Ah non, j'ai mes règles!"

Au 19e siècle, les menstruations étaient perçues par les physiciens comme étant un signe de plus démontrant l'infériorité et la faiblesse des femmes. Toutefois, il y a généralement une lueur de vérité dans toute idéologie, et les physiciens de l'ère victorienne n'avaient pas tout faux lorsqu'ils se concentraient sur l'importance des menstruations pour la santé globale; sur la relation entre l'utérus et la psyché; sur la sagesse du repos durant les règles. Nous avons tendance à rejeter tout ça parce que ça nous rappelle le temps où la vie des femmes étaient encore davantage contrôlée par les hommes, et parce que cela pue les vieux arguments qui faisaient en sorte qu'on gardait les femmes attachées à leur demeure et impuissantes dans le monde extérieur. Nous avons aussi, et nous avons franchement raison, rejeté l'idée que les processus naturels féminins soient une maladie. Mais de dire qu'une chose n'est pas une maladie et de l'ignorer en même temps, ce n'est pas nécessairement une seule et même chose. En ignorant les menstruations, en réactions aux idées de l'ère victorienne, peut-être avons-nous entièrement perdu le contact avec la conscience de sa valeur dans la vie des femmes.

Les changements survenus dans la vie des femmes au cours des trente dernières années peuvent semblés comme une révolution, mais de plusieurs façons, il s'agit plutôt d'une assimilation. Les femmes recherchant le pouvoir dans un monde dominé par l'homme tendent à le faire en agissant comme un pseudo-homme. Et peut-être involontairement, le féminisme a-t-il joué un rôle dans la suppression des menstruations. Une des plus grandes peurs que j'ai rencontrée chez des femmes ambitieuses et accomplies lorsque je discutais des anciennes pensées sur le pouvoir spirituel des menstruations, est que cela affecterait, d'une certaine manière, leur mythe d'être "tout aussi bien qu'un homme, et parfois meilleure". Plusieurs femmes refusent d'aller plus profondément dans leurs menstruations, de peur de ce qu'elles vont y découvrir. Il vaut mieux pour elles de supprimer leurs émotions avec des tranquillisants, de se vaporiser le vagin avec des déodorants pour déguiser l'odeur du sang, d'engourdir leurs douleurs avec des analgésiques, d'absorber leur sang avec des tampons afin qu'elles n'aient jamais à le voir vraiment. Il est ainsi plus facile de réussir en tant que femme dans un monde d'hommes.

La technologie de suppression - tampons, déodorants vaginaux, analgésiques sophistiqués et médicaments régularisateurs d'émotions - agissent ensemble au nom du mythe de la super-woman, pour créer une attitude culturelle prédominante voulant qu'une femme menstruée ne soit pas différente de celle qui ne l'est pas. Le problème avec ça, c'est que c'est tout simplement faux. Toute femme qui est le moindrement en contact avec son propre corps sait que lorsqu'elle est menstruée et même quelques jours avant qu'elle ne le soit, elle se sent différente. C'est un fait naturel qui ne peut tout simplement pas être nié.

Un des aspects des menstruations que j'aime et apprécie maintenant est son côté prévisible imprévisiblement. On ne sait jamais exactement quand elles vont survenir, et parfois elles vous surprennent complètement. Non seulement ne tiennent-elles pas compte des calendriers et des horaires, elles sont également salissantes. Hourra ! Nous essayons d'assainir et ordonner notre vie moderne, jusqu'au point où nous courrons le danger qu'il n'y ait plus de vie en nous. Les règles nous sauvent de cette mort - elles sont sauvages et primitives, brutes et instinctives, sanglantes et éternel aspect du féminin - et rien de notre civilisation ne changera cela. Mes règles sont un événement mensuel de ma vie, en commun avec toutes les femmes ayant vécues. Les femmes ayant vécu dans les cavernes, il y a plus de vingt mille ans, les prêtresses de l'Égypte Ancienne, les prophétesses de l'Ancienne Sumer, etc., toutes saignaient avec la lune. La première femme qui fabriqua le feu avait probablement ses règles à ce moment. C'est une idée. Si les menstruations sont un temps de créativité intense pour les femmes, autant psychiquement que spirituellement, qui sait tous les dons et découvertes qui ont pu être apportés à l'humanité par des femmes menstruées?

La valeur que nous donnons aux menstruations est intimement liée à la valeur que nous nous donnons nous-mêmes, en tant que femmes. Et cela affecte les hommes également. Nous voyons les deux sexes comme étant des êtres séparés, et d'une certaine manière, ils le sont. Mais d'une autre, nous faisons tous partie de cette famille humaine, et la manière dont les femmes se perçoivent affecte les hommes aussi. Si nous voyons les choses seulement en surface, nous pouvons croire que l'homme avait le beau rôle dans les deux derniers millénaires - mais c'est seulement vrai d'une certaine perspective. Les hommes comme les femmes ont joui et souffert des déséquilibres de la société patriarcale. Les hommes ont également été séparés de leurs corps et de leurs émotions, et du plaisir et de la guérison possibles dans une relation de coopération plutôt que dans une relation de hiérarchie et de dominant/dominée.

Imaginez un monde où les hommes et les femmes travaillent ensemble à développer leur sens de paix intérieure, en prenant du repos pour quelques jours, une fois par mois. Un monde dans lequel les hommes encouragent les femmes à prendre quelques jours de paix, de silence. Un monde où le sang menstruel serait une fois de plus considéré comme un liquide magique, ayant le pouvoir de nourrir la vie nouvelle. Un monde où les menstruations seraient vues comme le Sabbat des Femmes - un espace naturel pour la retraite, l'introspection et le travail intérieur, une fois chaque cycle lunaire. Duquel les femmes émergeraient comme des nouveau-nés, renouvelées, ayant mué de leur vieille peau.

Pourquoi appeler les Menstruations le Sabbat des Femmes ?

Il y a quelques années, j'ai eu l'opportunité de passer quelques périodes de temps, seule dans un coin magnifique, dans les Sierras, près du Lac Tahoe, sacré pour les Indiens. J'ai commencé à faire des retraites lorsque j'avais mes règles, ainsi en paix et seule, assise sur la terre au soleil, avec des lézards et des geais bleus pour seule compagnie, avec le vent, la lune et le soleil, les rayons de couleurs reflétant sur le lac pour me guider et me divertir. Je voyageais à l'intérieur de ma psyché et je me retrouvais parfois en pleurs, pour quelque chose longtemps oublié, un événement de mon enfance ou de mon adolescence. Mes règles devinrent un temps où je me trouvais particulièrement capable de m'ouvrir au matériel psychologique et à relâcher mes émotions. Je remarquai que, après les quelques premiers jours de saignement, je devenais très silencieuse et calme pour un jour ou plus, et où apparemment rien ne se passait - un espace vide après tant de pleurs et de souvenirs. Puis, alors que mes règles se terminaient, il y avait quelques heures de clarté pendant lesquelles j'étais très créative, ouverte aux informations à propos du futur - généralement sur le mois à venir, parfois plus qu'un mois. Cette tendance se poursuit, bien que moins intense maintenant.

La plus grande partie de l'encombrement psychique profondément ancré en moi a été libéré - probablement autant que ma psyché souhaitait m'en faire aborder à ce stade de ma vie. Maintenant, je me sens plus "mise-à-jour" avec moi-même, alors il y a moins de lâchers-prise, probablement à cause de tout le travail que j'ai fait là-dessus les mois précédents. Je me bats encore avec le temps vide, en commençant à faire certaines choses, m'imaginant que si rien ne se passe à l'intérieur, c'est que je peux retourner à mes affaires dans le monde extérieur. Puis, je reconsidère la chose, en me disant que j'ai accompli peu et usé de beaucoup d'énergie. Il est difficile de s'asseoir calmement lorsque rien ne nous apparaît pour le travail intérieur, il est difficile pour moi d'honorer ce vide, même lorsque je sais qu'il précède la créativité, l'inspiration et les idées nouvelles. Cela fait partie du processus, mais c'est une partie un peu dramatique où j'ai encore tendance à me fouler les pieds.

Je n'ai pas de rituel quotidien de méditation. Je préfère ajuster mon temps de contemplation avec mes propres impulsions. Souvent, lorsque j'ai mes règles, je vais dans un endroit calme, solitaire et méditatif pour trois ou quatre jours, et puis le reste du mois, je me repose moins. Cela me paraît comme un rythme naturel pour moi, et c'est pourquoi je vois les menstruations comme le Sabbat des Femmes.

Saigner sur la Terre

Traditionnellement, les femmes autochtones d'Amérique se rendaient à une loge-lunaire où elles saignaient, et elles le faisaient sur la mousse, assises sur la terre. Elles considéraient que la relation entre les femmes et la Terre était très importante, et cette relation était nourrie grâce aux saignements sur la terre. Lorsqu'elles font cela, les femmes ont un lien direct et cellulaire avec la terre, qui les stabilise et les équilibre.

Lorsqu'une amie m'a parlé pour la première fois de saigner sur la terre, j'ai pensé que c'était un peu dingue, un peu prétentieux. Mais j'ai quand même tenté de le faire, puis j'ai commencé à ressentir une connexion avec quelque chose de très ancien. Un des problèmes que j'avais perçu était comment j'étais sensée le faire. Les femmes autochtones le faisaient assises sur de la mousse, dans les loges lunaires. Où étais-je supposée m'asseoir et saigner ? Même si je trouvais un bout de terre pour m'asseoir dessus, je ne souhaitais pas y rester tout le temps. Puis, j'ai commencé à utiliser des serviettes en tissu pour absorber mon sang et les tordre dans l'eau avant de les laver. J'ai réalisé que je pouvais verser l'eau de sang sur la terre. Alors, c'est ce que je fais maintenant. L'eau est d'un beau rouge, et je la verse sur le sol près des plantes, et ce faisant, cela me remplit d'un sentiment de connexion, de légitimité, d'être en paix avec quelque chose qui est souvent négligé dans la société moderne. De simples gestes de valeurs, un simple savoir.

C'est comme couper du bois, bercer un bébé, faire cuire du pain, boire à une source d'eau coulant à travers la montagne. Ce sont de ces actes humains qui sont intemporels, de valeur éternelle, faisant partie de notre vie et de notre mort. Les cellules qui meurent dans mon corps, emportées dans le sang menstruel, sont de la nourriture pour la terre. Ce qui meurt donne la vie. Ce qui meurt nourrit ce qui vit et ce qui vivra. Si j'ignore mon sang, je me distancie de ce savoir. Si je crains et déteste mon sang - si je ne sais pas qu'il s'agit d'une nourriture, qu'il s'agit d'un don que je porte - alors je le vois comme une pure perte. Une perte de sang, une perte de temps, un enfant qui n'a pas été conçu. Que je désire une grossesse ou non, mon sang est toujours un don, un cadeau. Et c'en est un au sens littéral, tout comme un don psychique à moi-même. C'est un cadeau de mon corps pour la terre : la mère qui m'a nourrie et qui me nourrie tous les jours de ma vie.

Lara Owen
www.laraowen.com

Lire le livre de Lara Owen sur la célébration des menstruations :
Her Blood is Gold : Awakening to the Wisdom of menstruation
0 Commentaires

.: Célébration du Sang-de-Lune

2/27/2013

0 Commentaires

 
Photo
Dans la pénombre, j’allume la bougie des Lunes Rouges pour annoncer leur venue.

Photo
J’offre le sang sacré dans le coquillage, devant le crâne de jaspe rouge, posé pour y représenter la lignée des femmes de ma famille. Le sang peut sécher dans le coquillage, je recueille ensuite la « poussière » rouge-noire et la garde dans un petit pot hermétique. J’ajoute cette poussière de sang à mes eaux, huiles et sels sacrés pour leur donner mon pouvoir.

Photo
Je porte les serviettes lavables, que j’ai achetées chez Vulva Love Lovely (sur Etsy), que j’ai trouvées superbes avec ces crânes et ces couleurs à la mexicaine, qui d’ailleurs portent le nom « Dia de los muertes ». Ces serviettes sont une manière écologique de recueillir le sang des lunes et d’honorer son sang (qu’on ne jette pas à la poubelle!).

Photo
Mais il y a aussi ma Diva Cup, adoptée en 2009, et qui se range adorablement dans cette petite pochette en forme de fraise, achetée également sur Etsy.  La Diva Cup permet un contact plus direct avec les lunes, ce qui est parfait pour les apprivoiser et pour connaître son corps, en plus de permettre de recueillir directement le sang et l’utiliser ensuite pour les célébrations.

Photo
Cette autre petite pochette traîne partout où je vais, lors de mes lunes, car elle contient mes pierres bénéfiques et mon sachet d’herbes préparé pour l’occasion.

Photo
La Fleur-Yoni contient 13 pépins, soit de cerises ou de pommes, pour représenter les 13 lunes rouges de l’année. Je retire donc un pépin à chaque lune rouge.

Photo
Et évidemment, Ataro, mon tambour, m’accompagne lors de mes voyages et est particulièrement bénéfique pour calmer les douleurs et m’aide à « chevaucher » la transe qui accompagne les lunes.

Photo
J’ai également préparé un joli coffre en bois, sur lequel j’ai pyrogravé des symboles et un poème de mon cru, traduit en norrois et transposé en runes (grâce à mon ami Manu!), qui contient mes outils liés à la célébration de mon sang-de-lune.

0 Commentaires

Dévotion & Sang-de-Lune

8/6/2010

0 Commentaires

 
Photos des Femmes Rouges, à la rencontre dévotionnelle du vendredi 6 août 2010 où elles ont confectionné des sachets & boîtes pour célébrer leur Sang-de-Lune et où elles ont peint avec leur sang.
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
Picture
0 Commentaires

    Mystères du sang féminin

    Tous les articles sur les mystères féminins, ou les mystères du sang.

    Picture

    Archives

    Mars 2023
    Août 2020
    Juillet 2018
    Mai 2017
    Août 2016
    Mai 2015
    Mars 2015
    Décembre 2014
    Septembre 2014
    Juillet 2014
    Mai 2014
    Décembre 2013
    Septembre 2013
    Juillet 2013
    Mai 2013
    Avril 2013
    Mars 2013
    Février 2013
    Juillet 2011
    Mai 2011
    Février 2011
    Août 2010
    Juin 2010
    Mai 2010
    Avril 2010

    Catégories

    Tous
    Art
    Contraception
    Coupes Menstruelles
    Culte
    Cycle Menstruel
    Grossesse Et Maternité
    Grossesse Et Maternité
    Herboristerie
    Isis
    Magie
    Ménopause
    Sagesse Menstruelle
    Santé
    Santé
    Sexualité
    Tabous Menstruels
    Utérus

    Flux RSS

Propulsé par Créez votre propre site Web à l'aide de modèles personnalisables.